Bien que j’en aie déjà parlé brièvement ici, je voudrais revenir un instant sur le corridor.
Lorsque nous quittions l’appartement N° 17, occupé par mes grand parents et lieu de retrouvailles où se prenaient les repas pour rentrer le soir, vers l’appartement N° 15, occupé par notre famille, nous passions par un couloir extérieur.
Nous allions donc » du 17 au 15 » en passant devant » le 16 » où résidaient nos cousins. En demandant » où était Arnaud », on pouvait s’entendre répondre » Je crois qu’il est au 16 « .
Les affectations ont varié avec les étés, mais nous avions souvent le 15. Nous avons même loué le 14, lorsque la famille est devenue trop grande (puis un appartement à l’étage au dessus).
En fermant la porte du 17, ce qui n’allait pas sans précaution compte tenu d’un éventuel courant d’air qui pouvait la faire claquer, on manœuvrait une grosse poignée métallique dorée. La poignée avait un trou pour la clé à l’extérieur, et à l’intérieur, un mécanisme avec un petit bouton permettant de verrouiller la porte.
Il me semble qu’à l’horizontale, le petit bouton était libre et saillant, et à la verticale, rentré en position verrouillée. La poignée, elle, circulait de façon élastique, sauf quand elle était verrouillée.
Le mur du couloir était revêtu d’une sorte de crépi rouge extrêmement agrippant, qui permettait de se hisser aux barreaux des fenêtres des pièces qui donnaient sur cette coursive, ce que je ne manquait pas de faire tout au long du trajet retour.
Je ne me souviens pas vraiment si je l’ai fait une seule fois dans le but de regarder à l’intérieur, mais je ne pense pas. Mais c’était si simple…
De l’autre côté, presque à portée de main, le flanc de la colline, dans la pierre rouge, à cassures anguleuses, et le petit chemin qui montait au milieu des clématites que plus tard, on fumerait en toussant.
Mais ce n’était qu’un petit embranchement du vrai petit chemin, qui mériterait un blog à soi tout seul.
Lorsque nous avons pris un appartement à l’étage au dessus, cela nous obligeait à d’incessantes allées et venues, soit dans l’escalier, en claquant des tongs, soit par l’ascenseur.
« Sofcas », avec un F englobant, c’est la marque qu’on trouvait gravée dans la barre de sol de l’ascenseur, qui fixait un lino marbré vert d’odeur si particulière que c’est une des seules, avec le safran et quelques autres, que je puisse rappeler à volonté. De même, le petit bruit sec des démarrages et des arrêts à l’étage.
A part le bouton RC, blanc comme les autres avec le numéro d’étage, mais plus usé, il y avait un bouton rouge STOP, et un autre, une sorte d’interrupteur chromé qui je crois devait déclencher une alarme. La hantise d’appuyer sur le bouton rouge.
Pour accéder à l’ascenseur, il fallait traverser un hall tapissé lui aussi de lino, où s’étalaient les larges boîtes aux lettres de bois miel, avec les noms des propriétaires en lettres bâton dorées dormant à l’abri de l’inclusion plastique noire, belles comme un pare-choc de DS.
La baie vitrée avait une porte lourde comme un âne d’autant plus mort que nous la poussions en général au retour de la plage, affamés, et arc-boutés contre l’énorme poignée en métal torsadée noire.
A gauche de l’ascenseur, il y avait la porte du local poubelles, mais aussi celle, avec son rectangle vitré, de la cabine téléphonique. Dans les premières années, lorsque les appartements n’avaient pas le téléphone privé, le gardien décrochait, répondait, et venait vous prévenir.
Avant d’arriver à la porte, il y avait le parking, les massifs avec les mimosas et le lampadaire, et l’étage des garages. On pouvait aussi contourner l’immeuble par la droite avec un couloir taillé à flanc de rocher, souvent sombre et frais, avec sa rigole parfois chargée de feuilles de laurier-rose sèches.
Une fois, une des dernières fois sans doute, nous avons mis nos mobylettes sur ce parking. Étais-je encore vivant ? Je n’en suis pas sûr, les choses sont déjà très brouillées à cette époque.
Il y a très longtemps, il y avait la Chambord noire de grand père. Les choses étaient plus claires alors.
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